dimanche 23 novembre 2008

Réflexion sur la sidra Toledot

La bénédiction d'Isaac

Ariel REBIBO

"Et ce fut, quand Isaac vieillit, ses yeux s'obscurcirent au point de ne plus voir. Il appela Esaü, son grand fils, et lui dit : Mon fils. Il lui dit : Me voici."

Avant de mourir Isaac souhaite bénir son fils Esaü (Gen. 27). Mais il bénit finalement son deuxième fils Jacob déguisé en Esaü. L'aveuglement explique le fait qu'Isaac soit trompé par Jacob. Certains commentateurs voient encore dans l'aveuglement d'Isaac la réponse à une question : Pourquoi choisit-il le fils le plus violent (25, 27) ?

"Esaü devint un homme connaissant la chasse, et Jacob devint un homme simple habitant sous les tentes."

Pour leur mère Rébecca, Jacob est seul méritant. Elle l'incite alors à prendre la place d'Esaü. Selon cette interprétation, le même aveuglement qui cache à Isaac la véritable personnalité de son fils Esaü, permet finalement à Jacob de prendre la place qui lui est due.

Toutefois, tel que le presente la Tora, Isaac ne méconnaît pas la personnalité de son fils Esaü. Elle précise ainsi que Esaü, à la suite de ses mariages avec des femmes hittites, déçoit ses parents (Gen. 26, 35) :

"Elles furent une amère affliction pour Isaac et Rébecca."

Pourtant Isaac décide de le bénir dans le verset qui suit. Plus encore, il évoque à cette occasion l'aspect guerrier d'Esaü (27, 3) :

"Et maintenant emporte tes armes, ton carquois et ton arc, sors dans la campagne et chasse du gibier pour moi. Fais-moi des mets comme je les aime, apporte-les-moi pour que j'en mange, afin que mon âme te bénisse avant que je meure."

Son esprit a bien perçu la violence d'Esaü. C'est avec lucidité qu'il décide de le bénir et non par aveuglement. Il tient précisément à faire dépendre la bénédiction de la personnalité particulière d'Esaü. Il lui enseigne que la puissance de son bras et la fougue qui l'anime n'expriment pas nécessairement un désir de pouvoir fondé sur la violence et la destruction. Sa force est indispensable pour faire de ce Monde un lieu de délices et de bénédictions. Mais ce défit, seul Jacob finira par le relever (27, 22) :

"Jacob s'avança vers Isaac, son père ; celui-ci le palpa et dit : La voix est la voix de Jacob, mais les mains sont les mains d'Esaü."

Par son mensonge, Jacob rétablit la justice que son père aveuglé ne peut observer.

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